Un document historique signé Fridolin Solleder
Lors de mes recherches aux archives municipales de Munich, j’ai découvert un article intitulé Brände und Feuerlöschwesen im mittelalterlichen München (Incendies et lutte contre le feu dans le Munich médiéval), signé Fridolin Solleder. Ce nom n’était pas inconnu dans le domaine de l’histoire bavaroise, et pour cause : Fridolin Solleder (1886-1972) fut un historien et archiviste reconnu, ayant dirigé les Archives d’État de Nuremberg et enseigné à l’Université d’Erlangen. Il a publié plusieurs ouvrages sur l’histoire de Munich, dont München im Mittelalter (1938), et a également dirigé la revue Das Bayerland, consacrée à l’histoire et à la culture bavaroises.
Cette découverte confère à cet article une crédibilité académique notable. Il ne s’agit pas d’un simple récit historique sans fondement, mais d’un travail potentiellement issu d’une recherche rigoureuse menée par un spécialiste des archives bavaroises. Toutefois, son contexte de publication reste à préciser, notamment en ce qui concerne la date exacte du texte et son éventuelle intégration dans un ouvrage plus vaste ou une revue scientifique.
Le contenu de cet article présente un intérêt particulier pour ma recherche, car il permet d’étudier la gestion des incendies à Munich au Moyen Âge, mais aussi d’en mesurer les continuités et les ruptures jusqu’au XIXe siècle, époque centrale de ma thèse.
Le contenu de l’article
Solleder décrit les défis posés par les incendies dans le Munich médiéval et les réponses apportées par les autorités de l’époque. À cette période, la ville, enserrée dans ses murailles et principalement construite en bois, était fréquemment ravagée par de violents incendies. L’incendie de 1327 aurait détruit un tiers de Munich, réduisant en cendres des quartiers entiers, dont l’église Saint-Pierre et l’hospice du Saint-Esprit.
Face à ces catastrophes, des réglementations anti-incendie ont été progressivement mises en place. Dès 1342, sous l’impulsion de Louis de Bavière, les autorités municipales interdisent l’usage des toits en chaume et en bardeaux, trop inflammables, et encouragent la construction en pierre avec des toitures en tuiles. L’introduction de ces premières normes urbanistiques marque une volonté politique de prévention des risques qui se développera plus encore au XIXe siècle.
L’organisation des secours repose alors sur un système collectif où chaque citoyen a un devoir de lutte contre le feu. Des guetteurs postés dans la tour Saint-Pierre ont pour mission d’alerter la population par des signaux sonores. Toute personne refusant d’aider à combattre un incendie est sanctionnée. À l’inverse, les premiers arrivés avec de l’eau ou des outils peuvent recevoir une récompense. Certains métiers sont particulièrement impliqués : charpentiers, maçons, meuniers et tonneliers doivent obligatoirement prêter main-forte en fournissant matériel et assistance.
Cette gestion du risque repose ainsi sur une forte mobilisation communautaire, dans une société où l’absence de services professionnels impose une responsabilité collective en cas de sinistre. Solleder montre ici comment la lutte contre les incendies, dès cette époque, fait l’objet d’une organisation méthodique et d’une régulation croissante.
Un intérêt majeur pour comprendre l’évolution du rôle des pompiers
Bien que cet article porte sur le Moyen Âge, il permet d’éclairer plusieurs aspects de l’histoire des pompiers bavarois au XIXe siècle, période au cœur de ma recherche.
Le premier enseignement concerne les continuités et ruptures dans la gestion des incendies. L’interdiction progressive des matériaux inflammables, amorcée dès le XIVe siècle, se retrouve dans les normes de construction du XIXe siècle, où les régulations deviennent encore plus strictes. De même, la mobilisation citoyenne face aux incendies, omniprésente au Moyen Âge, se poursuit avec la coexistence des pompiers volontaires et professionnels, qui persiste jusqu’à aujourd’hui en Allemagne.
L’article de Solleder permet aussi de s’interroger sur l’origine des premières régulations en matière de prévention des incendies. Les décisions municipales visant à limiter la propagation des feux en imposant des toitures en tuiles et des bâtiments en pierre sont des précurseurs des réglementations modernes. Ces mesures traduisent une prise de conscience ancienne des dangers liés aux incendies et du besoin d’une politique urbaine de prévention.
L’évolution du rôle des pompiers apparaît également en filigrane. Alors qu’au Moyen Âge, la lutte contre le feu est une obligation collective, le XIXe siècle marque une spécialisation progressive de cette fonction, avec la création de corps de pompiers organisés et formés. La distinction entre engagement civique et professionnalisation se précise, avec un passage d’une responsabilité communautaire à une organisation plus structurée.
Les limites d’une source à contextualiser
Malgré son grand intérêt, cet article soulève des questions méthodologiques importantes. Son origine exacte reste à clarifier. L’article ne précise ni sa date de publication, ni s’il est extrait d’un ouvrage scientifique ou d’une revue historique. Étant donné que Solleder a publié München im Mittelalter en 1938, il est possible que ce texte en soit un extrait ou une version remaniée. Il est donc impératif de retrouver la publication originale pour en assurer une exploitation rigoureuse.
L’approche de Solleder est avant tout descriptive. Il relate des faits et cite des règlements sans toujours expliciter ses sources. Si son statut d’archiviste lui confère une grande fiabilité, une vérification croisée avec d’autres documents d’archives serait nécessaire pour renforcer la validité de ses affirmations.
Le texte semble également incomplet, certains passages étant tronqués. Il pourrait s’agir d’un extrait d’un texte plus long, dont la conclusion apporterait des éléments supplémentaires. Une recherche approfondie est nécessaire pour identifier si d’autres écrits de Solleder ou des publications contemporaines de son travail développent ces questions.
Enfin, pour l’exploiter dans ma thèse, il est indispensable de croiser cette source avec des documents du XIXe siècle, notamment des ordonnances municipales et des archives judiciaires, afin d’évaluer la persistance des pratiques médiévales et leur transformation progressive.
Conclusion : une source précieuse mais à compléter
L’article de Fridolin Solleder constitue une source de premier ordre pour comprendre l’histoire des incendies à Munich et les premières mesures de prévention mises en place dès le Moyen Âge. Son auteur, historien et archiviste bavarois renommé, lui confère une valeur académique incontestable, qui dépasse le simple témoignage anecdotique.
Ce document illustre un processus historique majeur : le passage d’une gestion communautaire des incendies à une organisation spécialisée, qui trouve son aboutissement dans la professionnalisation des pompiers au XIXe siècle. Il met aussi en évidence les continuités entre les réglementations médiévales et celles du XIXe siècle, soulignant la persistance d’une logique de prévention et d’encadrement des risques.
Cependant, en raison de son origine incertaine et de son approche descriptive, il doit être exploité avec prudence et complété par d’autres sources documentaires. La prochaine étape consistera donc à retrouver la publication originale et à vérifier l’authenticité des faits cités à travers des archives officielles.
Cette découverte ouvre une nouvelle piste de recherche dans le cadre de ma thèse et constitue un point de départ pour une analyse plus approfondie des politiques de lutte contre les incendies en Bavière.
